Village Amagaz

Notre cinéaste: Said Bellili


Rencontre avec le cinéaste Saïd Bellili, réalisateur du film “La malédiction”


Natif d'Amagaz Commune de Mcisna, région de Seddouk en basse Kabylie.

Avec sa dernière réalisation en l’occurrence "Daâwessou" un long métrage en langue kabyle de prés de deux heures.

Saïd Bellili, puisque c’est de lui qu’il s’agit  entre par la grande porte dans le cercle très fermé du septième 7e Art.

Autodidacte, il a commencé sa carrière dans le théâtre pendant les années 80 avec à son actif 3 pièces théâtrales. Après une petite formation dans le domaine du 7e Art en 1998, à Alger, il  se tourne vers le cinéma.

En 2000, il réalise son premier documentaire sur les sinistrés du séisme des Ath Ouarthirane. En 2002, il coréalise un deuxième documentaire sur les handicapés intitulé "A la recherche du bonheur" puis un court métrage de fiction de 26 minutes en 2005 sur la prévention contre le  Sida.

Son nouveau  film, retrace l'histoire de deux jeunes, Idir et Ferroudja, liés par un amour sincère.

A travers elle (cette histoire) c'est aussi l'histoire de toute une génération des années soixante. Une histoire poignante, un témoignage contre l'oubli que les damnés de la terre ont vécu comme une malédiction.

D’un autre côté, Idir voulait partir en France pour rechercher son frère disparu depuis plusieurs années, mais son père le lui interdit formellement.

Après la mort de ce dernier et en dépit de son insistance pour partir en France, sa femme tente de le dissuader, malgré le dénuement et la misère qui sévissent en cette période post-coloniale, mais cette fois-ci, Idir répond au chant des sirènes (chants de l'exil), et part en France et la malédiction de son père sur lui et le poursuivra à tout jamais.

Tourné en Kabylie, ainsi qu’à  Aubervilliers et à Saint-Denis en France avec des comédiens amateurs — excepté la comédienne et poétesse Hadjira Oubachir qui y interprète le rôle féminin principal.  A signaler également la participation du chanteur Hamid Ouagrani auteur d’un tube qui a rythmé la vie de toute une génération intitulé "Ourgagh Kem Athasekourth".  Nous l’avons rencontré à Seddouk où il a accepté de répondre aimablement à nos questions.

 

A. T.

La Dépêche de Kabylie : “La Malédiction” : pourquoi ce titre ?

Saïd Bellili : Comme c’est un film qui retrace une histoire ancienne alors à travers  cette œuvre je voulais faire un témoignage contre l’oublie donc  "Daâwassou" ou  La Malédiction en référence à ce qui se disait anciennement concernant la malédiction qui poursuit tout un chacun qui ose offusquer ou contredire la volonté de ses parents. L’histoire du film s’inscrit dans cette logique puisque le jeune Idir s’est opposé à la volonté de son père qui lui avait interdit de se rendre en France pour rechercher son frère disparu, mais une fois le père décidé, Idir succombe  au chant des sereines et part en France. Une fois là-bas, il n’a ni réussi son exil ni retrouvé son frère.  

 

 

Quel sont les lieux du tournage de ce film ?

Le tournage a eu lieu dans deux villages : le premier c’est Ighil Melloulen commune de M’cisna à 1000 mètres d’altitude où a eu lieu le premier tour de manivelle un certain 25 décembre 2003 et le deuxième à Beni Djaâd, commune d’Amalou et je tiens à remercier au passage l’Association Tafsut de Beni Djaâd. C’est grâce à eux et au dévouement de l’ensemble des habitants que j’ai pu tourner pendant 15 jours. Ensuite, je me suis déplacé en France a Aubervilliers, Courneuve et à Saint Dennis non sans difficultés avec une équipe réduite étant donné le manque de moyens financiers.

 

 

Concernant exactement ce point avez-vous reçu une aide financière pour concrétiser votre projet ?

A part l’aide de l’ONDA et les recettes dérisoires que j’ai récolté de la vente de l’un de mes documentaires à l’ENTV, aucune aide ne m’a été attribuée. J’ai réalisé ce film avec l’aide de l’équipe technique et des comédiens, à ce jour, personne n’a reçu un seul sou, car ils savaient bien que les moyens financiers manquaient cruellement, mais Dieu merci, on a travaillé dans une bonne ambiance. Je vous signale au passage à ce sujet que j’ai introdui un dossier au niveau du ministère de la Culture en 2004 car on m’avait promis de m’aider. Mais en 2007 c’est un rejet que je reçois.

Comment avez-vous procédé au choix des comédiens ?

Pour commencer je dirai que pour moi l’artiste n’a pas de statut. Il n’y a donc pas de différence entre les  comédiens amateurs et  les professionnels même si je compte dans mon équipe des visages très connus à l’image de Hadjira Oubachir qui a joué dans plusieurs films ainsi que Hamid Ouagrani qui est un chanteur très connu. Pour réunir cette équipe, j’ai dû organiser un casting à l’université de Béjaïa et à la Maison de jeunes de Seddouk afin de dénicher des comédiennes car c’est là que réside le problème étant donné que ce n’est pas facile de trouver des filles pour des rôles dans le cinéma vu nos traditions et coutumes.

 

 

Quelles sont les difficultés que rencontre un réalisateur qui fait  un film en kabyle ?

Rien n’est facile dans le cinéma notamment quand il s’agit du tournage d’un film qui retrace une histoire ancienne ;  alors là les choses se compliquent davantage vu le décor spécifique que cela nécessite ! Notons que les villages kabyles ont beaucoup changé.

Il est presque impossible de trouvé un bon endroit pour tourner une scène sans que le béton ne soit associé ou qu’un poteau électrique ne fasse son apparition.

 

 

Comment s’est déroulée l’avant-première de votre film à la Cinémathèque de Béjaïa ?

Le film a été reçu favorablement lors de sa projection en avant-première à la cinémathèque de Béjaïa et son directeur m’a assuré qu’ils n’ont  jamais vu un tel engouement de la part du public pour une production quelconque depuis quinze (15) ans, chose qui m’a énormément fait plaisir. J’ai aussi projeté mon film à Timezrit avec l’association “Ciné plus” en hommage à Azzedine Meddour, à Ighil Ali en hommage à Taous Amrouche, à Ighzer Amoukrane, en hommage à Malek Bouguermouh.

Les prochaines projections auront lieux au village Beni Djaâd et à Seddouk que le public a réclamé volontiers avec insistance, et finalement à la salle El Mouggar en été probablement. Le film sortira aussi en France.

Avec qui comptez-vous sortir et distribuer ce film en France?

Probablement avec Akfadou Production étant donné que le patron de cette boite que j’ai eu au téléphone m’a donné son accord de principe, reste maintenant à discuter les négociations sur le contrat et autres détails.

 

 

D’autres projets en vue ?

Oui, les projets ne manquent pas. Actuellement j’ai quatre scénarios : entre autres un court métrage de 26 minutes et un feuilleton de 15 épisodes de 52 minutes chacun de Rachid Smaili consacré à la guerre d’Algérie ou je compte reconduire l’équipe qui a joué dans La malédiction et d’autres comédiens au besoin, mais pour ce faire j’attends toujours les subventions nécessaires, car je ne compte pas le lancer sans le montage financier.

 

 

Un mot pour conclure

Il y a une nouvelle génération de cinéastes qu’il faut prendre en charge et rendre au 7e Art sa place dans notre pays, étant donné que les volontés et talents existent pour redorer le blason de notre culture et continuer sur les traces de Azzedine Meddour, Lakhdar Hamina et Dda Abderrahmane. En ce qui me concerne, je dirais que le cinéma c’est ma vie tout simplement.

 

Interview réalisé par Arezki Toufouti



24/04/2009
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